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A l’approche des principaux objectifs de l’année, les coureurs participent régulièrement à des camps d’entraînement pour améliorer leur condition physique en vue des courses. Dans le cadre de leur préparation pour le Critérium du Dauphiné et le Tour de France, sept coureurs de l’équipe se sont réunis en Sierra Nevada (Espagne), au centre de haute performance du CAR (Centro de Alto Rendimiento), situé à plus de 2300 mètres d’altitude, afin de s’entraîner dans les meilleures conditions pendant trois semaines. Voici en quoi consiste un tel stage.

Les objectifs d’un stage en altitude sont nombreux et son organisation est minutieusement préparée par les entraîneurs de l’équipe. Jean-Baptiste Quiclet, notre directeur de la performance, nous décrit ce que nous recherchons ici, dans le sud de l’Espagne, pendant ce mois de mai : « En étant en altitude, la pression barométrique est plus basse, ce qui signifie que l’organisme doit lutter davantage pour capter l’oxygène et le transporter vers les muscles et les organes. Cela crée un stress qui engendre des développements physiologiques additionnels pour résoudre ce problème. »

L’adaptation à de telles conditions ne se fait pas en trois jours, et les coureurs doivent passer un minimum de deux semaines en altitude pour observer les effets positifs de ce stage. « Il y a deux phases : une phase d’acclimatation aiguë, suivie d’une phase d’acclimatation chronique », explique Jean-Baptiste. « Les effets durables n’apparaissent qu’après l’acclimatation chronique, c’est pourquoi nous devons rester suffisamment longtemps. »

La cohésion d’équipe est également très importante afin de préparer une course de trois semaines comme le Tour de France. Les coureurs passent 24h/24 ensemble, ce qui leur permet d’apprendre à se connaître mutuellement et de communiquer « sans même avoir besoin de parler », comme le souligne Felix Gall.

Pourquoi la Sierra Nevada ?

Jusqu’en mai, la plupart des coureurs qui participeront au Tour de France n’ont pas eu l’occasion de gravir de longs cols en haute altitude, c’est pourquoi la Sierra Nevada est un lieu idéal. Chaque jour, les sorties incluent des cols d’une durée de 1h10 à 1h30 pour se préparer à la difficulté du parcours du Tour de France.

S’ajoute également le facteur météo, nécessaire pour réaliser un stage dans les meilleures conditions. Peu d’endroits en Europe permettent de combiner tous ces éléments. « Il y a trois sites connus en Europe occidentale, c’est pourquoi tous les athlètes se retrouvent sensiblement au même endroit. Les effets physiologiques d’une exposition à l’altitude commencent à partir de 2000 mètres, donc lorsque nous examinons la carte de l’Europe et identifions les lieux de vie situés au-dessus de 2000 mètres, il y en a très peu : la Sierra Nevada, le Teide aux Canaries et l’Etna en Sicile. »

La date choisie pour ce stage est cruciale afin d’en conserver les bienfaits jusqu’au Tour de France. Comme pour la plupart des équipes, ce il a lieu au mois de mai. Jean-Baptiste Quiclet nous explique pourquoi : « Pour le Tour de France, nous sommes un peu contraints car nous devons faire l’altitude avant le Dauphiné, car il n’y a pas suffisamment de temps pour une exposition prolongée après. C’est pourquoi, comme 99 % des athlètes, nous avons l’habitude d’aller en altitude en mai après la première partie de la saison, qui se termine avec Liège-Bastogne-Liège ou le Tour de Romandie. »

Les difficultés de l’altitude

En arrivant en Sierra Nevada, les coureurs se préparent à vivre trois semaines très exigeantes, avec de nombreuses heures d’entraînement dans un environnement où le corps récupère moins bien. Il est idéal d’arriver en pleine forme et bien reposé pour pouvoir réaliser au mieux ce stage. Dorian Godon n’a pu effectuer que quelques sorties avant de tomber malade et de devoir rentrer chez lui, dans l’incapacité de poursuivre le stage dans ces conditions. « Si tu es déjà un peu malade ou fatigué et que tu vas en altitude, je pense que tu ne t’en remettras pas », confie Felix Gall. « La grande différence est la récupération qui est plus difficile, surtout les premiers jours. Au début, les nuits sont mauvaises, on peut avoir des maux de tête et se réveiller souvent. »

Il est donc important de suivre de près les coureurs pour s’assurer qu’ils assimilent bien l’entraînement et les conditions dans lesquelles ils évoluent au cours de ce mois de mai. « Nous effectuons un suivi physiologique tous les matins en mesurant l’hydratation, la saturation en oxygène, l’analyse de la variabilité de la fréquence cardiaque et le poids, car on peut rapidement souffrir de déshydratation à une telle altitude », précise Jean-Baptiste. « Nous nous coordonnons tous ensemble, que ce soit avec les directeurs sportifs, les entraîneurs, les nutritionnistes, et toute l’équipe, afin de mettre en place les séances d’entraînement et le programme quotidien en fonction de l’adaptation des coureurs à l’altitude. »

Le rôle de Julien Louis, le nutritionniste de l’équipe, est donc primordial. Chaque jour, il établit un plan nutritionnel personnalisé pour chaque coureur, en fonction de la séance d’entraînement qu’ils doivent effectuer. S’ils parviennent à suivre scrupuleusement ces recommandations, les coureurs ne devraient pas manquer d’énergie !

Une journée type

Tout est mis en place pour que les coureurs évoluent dans un cadre idéal pour s’entraîner, en commençant dès le matin par un petit-déjeuner préparé selon les consignes de Julien le nutritionniste. Felix Gall décrit sa journée : « Après le petit-déjeuner on se prépare pour aller s’entrainer vers 10h. La majorité de nos sorties font entre 4 et 6h, avec la plus longue du stage à 7h. Ensuite on rentre en début d’après-midi, on mange puis nous avons les massages. Le reste de la soirée on se détend et on joue même un peu au ping-pong ! »

Les massages sont également le moment propice pour discuter de petits ajustements à apporter ou de soins à mettre en place. Gregory Mallevre, l’un des kinésithérapeutes de l’équipe, explique : « Après leur sortie, en plus de masser les coureurs, nous en profitons également pour effectuer des mobilisations ou des étirements, insister un peu plus sur les petites gênes ou les petites douleurs qu’ils peuvent avoir. C’est un travail intéressant car nous pouvons suivre leur évolution sur plusieurs jours, voire plusieurs semaines. L’échange avec le coureur est également beaucoup plus facile car il n’est pas sous la pression de la course et est plus détendu. »

C’est aussi l’occasion de réaliser quelques exercices de mobilité avec les coureurs et de vérifier leur routine. « Ce matin, nous avons mis en place une séance de mobilisation et d’échauffement musculaire, et chez certains coureurs, cela nous a permis, grâce à des exercices très simples, de constater qu’il y avait peut-être quelques points à travailler. Rien de catastrophique, mais ce sont des détails qui peuvent leur permettre de performer un peu plus. »

La gestion de la chaleur

D’habitude, la Sierra Nevada connaît un climat très chaud dès le mois de mai, avec des températures d’environ 20 °C au niveau de la station de ski où séjournent les coureurs, et atteignant les 35 °C dans la vallée. Cependant, l’hiver a décidé de faire une dernière apparition cette saison, et la neige s’est invitée sur les pentes de la Sierra Nevada pendant une bonne partie du stage. Comme la chaleur est un élément clé des courses estivales, notamment du Tour de France, une acclimatation préalable est primordiale.

Bien qu’il soit impossible de remplacer la chaleur naturelle du sud de l’Espagne, un outil est utilisé pour reproduire ce type de climat après les entraînements : le sauna. Jean-Baptiste Quiclet explique son utilisation : « Les athlètes ont besoin, tout comme pour l’altitude, de s’acclimater à la chaleur avant de pouvoir fournir des efforts intenses. Il est extrêmement difficile pour les coureurs de s’adapter du jour au lendemain à la chaleur. Si, malheureusement, il fait très chaud lors du Dauphiné, cela sera très difficile sans acclimatation. On met donc en place un protocole sauna immédiatement après les séances d’entraînement. Ce sont des techniques qui ont été validées, surtout dans la préparation des Jeux Olympiques de Rio ou Tokyo. »

Le dernier petit pourcentage

« Ce stage est un petit extra pour les courses importantes, ce qui nous permet de gagner les derniers pourcentages de forme. On est là pendant 3 semaines, avec rien d’autres à faire que de penser à la performance et à s’entraîner. L’équipe s’occupe de tout le reste. J’ai hâte d’être en juillet, la pression monte » témoigne Felix Gall. Et nous aussi !

Quelques photos du stage